Une étape difficile et magnifique. Comme hier, j’ai eu envie de marcher en solo, à mon rythme en profitant au maximum de cette journée offrant 70% de montées. Dans 2 ou 3 jours, la Sierra Nevada, exceptionnellement enneigée se négociera en évoluant en groupe (par sécurité).
Je pars le dernier de Walker Pass, il est 9h30. So Lazy Viggo ! Au passage, j’apprend (stèle) que le bien nommé « Col du Marcheur » est en fait un hommage rendu à un Joseph Walker qui découvrit ce col en 1834.


Comme d’habitude, la journée commence par une ascension, mais celle-ci fait près de 10 miles. J’adore. J’ai le pas léger et l’esprit occupé par des pensées positives. Je suis en totale communion avec ce qui m’entoure. Je pense à l’avenir avec optimisme, imagine d’autres voyages à partager. Je chante et je prends des photos. Bref, l’imbécile heureux au pays des ours.


C’est une chance que de pouvoir mettre à l’épreuve le corps (et le mental) dans ces conditions et d’en sentir les effets bénéfiques. Certes, j’ai dû perdre beaucoup de poids depuis un mois, mais il y a aussi la répétition des efforts, les distances parcourues, le manque de confort, qui peu à peu me rendent plus endurant et plus fort. La machine à endorphine est lancée. No pain no gain, comme on dit ici.

Une autre petite voix me dit aussi, pleine de sagesse, de ne pas m’emballer et de gérer cette aventure sur la durée. D’être à l’écoute de mon corps et de mes sensations.
Je fais donc régulièrement des pauses. Boire, manger des fruits secs, retirer les chaussures, s’allonger sur le dos … et tenter, en vain, de trouver un signal réseau pour le téléphone.
Aujourd’hui, il ne faut pas manquer les très rares sources pour se réapprovisionner en eau. Au mile 663, je remplis deux fois deux bouteilles que je vide aussitôt. La chaleur est suffocante, notamment sur les nombreux versants exposés au sud.


J’ai doublé tout au long de la journée la dizaine de hikers partis ce matin. Beaucoup choisissent de faire étape au mile 669, au lieudit Spanish Needle Creek.
Mon intention est d’aller jusqu’à un emplacement qui me mettra à moins d’une journée de Kennedy Meadows. Car 6 jours sans réseau, sans wifi, ça fait beaucoup. Sans douche et sans lessive aussi (qu’est-ce que je pue 😉!). Et il me reste à peine 1 jour de nourriture.
Après une nouvelle montée abrupte dans les rochers, le chemin se stabilise en crête et offre de beaux panoramas et des emplacements pour la nuit. Au mile 672, je retrouve Psycho en train s’installer sa tente. Bel endroit mais trop exposé au vent à mon goût. Je continue donc encore 4 miles pour trouver un endroit boisé, idéal, plat et cosy.

Dernier dîner froid avant Kennedy Meadows et la Sierra Nevada. Il me reste 26 miles pour y accéder. J’ai tant de choses à y faire: donner et prendre des nouvelles des proches, récupérer mes colis (matériel Sierra et nourriture ), prendre une douche, acheter de nouvelles chaussures, manger et boire beaucoup… Demain, je sors du maquis.