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J 83 – 22 juillet. Castle Crags campground (Mile 1502).

On se calme. On se calme. Après deux grosses journées, je me contenterai de 18 miles pour diverses raisons. La principale est la fatigue accumulée pendant ces chaudes journées.

Je pars très tôt ce matin pour profiter de la relative fraîcheur des premières heures. Notamment pour les 7 premiers miles en montée.

Toujours ce même scénario de chemin avec vue sur … rien. Rien que des arbres, élégants, immenses, imposants, mais n’offrant que rarement la possibilité d’avoir une vue ouverte sur cette superbe région.

Par une succession de « switchbacks » (virages), le chemin monte vers un plateau un peu « decoiffé », d’où, enfin, je peux apercevoir le Mont Shasta.

L’attraction locale est le prétexte à de nombreuses photos. Il est vrai qu’il se la raconte beaucoup avec son altitude moyenne, mais il a le charme des monts solitaires (Ventoux, Fuji, Kilimandjaro…) avec sa couronne de neige et son écrin de verdure tout autour.

Avant d’entamer la longue descente qui mène jusqu’à la vallée et l’interstate 5, je scrute le GPS en quête d’une piste forestière. A la fois parce qu’elle permet (parfois) d’aller plus vite mais surtout parce que la vue y est plus dégagée. Il y en a justement une, ancien tracé du PCT qui coupe l’immense boucle du Girard Ridge. Je l’emprunte sans hésiter. La piste est peu entretenue et s’enfonce dans une végétation dense, où règne le poison oak, plante urticante et terreur des randonneurs. Je continue au GPS sur une pente forte et galère 30 minutes avant de retrouver le PCT. Mais l’option « tout droit » m’a permis de gagner pas mal de temps avec mes godasses pourries.

Parce que l’objectif du jour c’est bien de rejoindre le general store de Casrella et de récupérer mon colis REI avec de nouvelles chaussures.

Les derniers miles vers Castella sont en descente. Avant de croiser la ligne de chemin de fer et l’autoroute, le PCT rejoint une large rivière (Sacramento river). Quelques pêcheurs à la mouche esquissent de beaux gestes au milieu de l’eau. Il y a de la grâce dans cette pêche, comme une chorégraphie en milieu sauvage.

Sacramento river
Et ses pêcheurs

Je m’arrête pour observer et manger un morceau. Il n’est que 11h00 mais, les jours de réapprovisionnement, j’ai tendance à finir ce qui me reste.

Puis j’effectue les derniers miles, off trail, qui mènent jusqu’au campground puis au general store (Admiratti) de Castella. L’endroit est en fait constitué d’une aire de repos boisée, d’une station essence, d’une épicerie et d’un bureau de poste.

Admiratti store

Comme mon colis n’arrivera que vers 15 heures, je repars vers le campground pour m’y installer. Un emplacement (le 25) est prévu pour les PCT hikers. Il y a même une hiker box avec notamment des jetons de douche. Je pose ma tente, vais recharger le matériel électronique aux sanitaires et prendre une douche. Puis je m’installe sur le matelas gonflable pour une sieste sous les pins.

Emplacement réservé aux PCT hikers

Deux hikers américains retraités me rejoignent. Ils parcourent un morceau du PCT chaque année, avant d’être rejoints par leurs épouses pour un tourisme plus cool. L’un d’eux (Howard) collabore avec la PCTA pour animer leur site web et rédiger des articles dans leur revue. Nous discutons beaucoup. Des anecdotes, des rencontres, de la traversée de la Sierra…

Doug et Howard, papys flingueurs

Il est très intéressé par le blog 24miles.fr et souhaite mettre en avant les blogs rédigés dans une langue étrangère. Le PCT doit gagner à être davantage connu hors USA. (même si 50 % des hikers rencontrés ne sont pas américains).

Nous échangeons quelques adresses (Ils habitent Seattle et ont un ami français qui a un appartement en Airbnb à Portland) et bons plans (restos de seafood, festival de rock alternatif, breweries) en prévision de mon road trip post PCT. L’après-midi passe tranquillement.

Je repars au general store et … ô miracle, UPS est en train de livrer mon colis. Nouveau modèle d’Altra, nouveau confort, je revis. Mes pieds vont me remercier. Traditionnelle photo des anciennes et des nouvelles shoes. Puis, avec un pincement au coeur, je jette à la poubelle la paire qui a vécu 700 miles et traversé toute la Sierra, les torrents, les cols enneigés, les éboulis, etc… « Objets inanimés avez vous donc une âme »…

Goodbye my friends

De retour au campground, je suis presque pressé d’etrenner cette nouvelle paire et de lever le camp pour parcourir 10 à 12 miles. Mais, sagesse oblige, il est 17 heures, il fait très chaud et le camp est confortable. Je reste pour la nuit.

Demain, c’est une montée de 20 miles qu’il faudra affronter. Autant dire que les chaussures vont être baptisées. En attendant, je dîne avec Doug et Howard en échangeant notamment sur les attraits touristiques du Pacific Nord Ouest. Puis, chacun regagne sa tente pour échapper aux attaques des moustiques.

Bonsoir.

Comme chaque soir de cette aventure, je fais le point et je laisse aller l’imagination. J’ai deja parcouru à pied 1500 miles (2400 km). Depuis quelques jours, je me rattache à des repères, des symboles pour me motiver. Le prochain sera le passage de la frontière Californie/Oregon (dans 5 à 6 jours). Sans doute rien de spectaculaire mais l’envie de passer à autre chose et de tourner une page. Et si le chemin est le même, c’est le marcheur qui aura changé.

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