Encore une très belle étape. Qui a démarré par un vrai petit déjeuner et du café chaud. Le trail magic d’Hélène et Mathieu restera un incroyable souvenir. A quelques encablures de la frontière canadienne, loin de tout, cet oasis de générosité donne un sens quasi mystique à la fin du périple.
J’ai appris, tout au long de ce parcours hors norme, à accepter la main tendue et l’aide de mes semblables. Faisant tomber certaines barrières qui, entre éducation et fierté mal placée, ont longtemps tenu les autres à distance. La vie est plus simple ainsi.
Je quitte ce petit groupe, félicite encore les « finishers », remercie les « angels » et reprend le chemin sous le soleil du matin.


Les paysages sont grandioses. Tels que je les aime, sans barrières, sans rideaux d’arbres. Où le regard peut scruter l’horizon et apprécier les perspectives. Entre les couleurs automnales du gazon naturel, les crêtes affûtées, le tracé du chemin en balcon et les reliefs en fond de tableau qui semblent infinis à l’oeil, on se sent à la fois libre et vulnérable.




A la faveur de quelques buissons généreux, je me gave de baies sauvages (myrtilles et framboises) en ralentissant consciemment le rythme. Je dégaine facilement le smartphone pour prendre quelques clichés de ce qui m’entoure. Je ne suis pas pressé.


Le chemin dessine des arabesques à flanc de montagne, déroulant un long ruban de sable ou de pierre vers le Canada que l’on devine au loin.

Peu de hikers (Je croise et félicite quelques finishers). Les sourires sont de rigueur, accompagnés d’un « Congrats guys ! » et d’une tape de la main à la manière des checks des ados.

Encore quelques beaux paysages en ligne de crête avant d’entamer une descente en surplomb du lac Hopkins où j’ai décidé de passer la nuit. Ses eaux calmes et reposantes sont propices à méditer et mettre un peu d’ordre dans le tourbillon de pensées et de sensations qui m’animent.

Putain, je ne suis plus qu’à 6 miles de la frontière ! Une paille, une promenade, une dernière ligne droite après ces milliers de kilomètres à pied dans le grand Ouest sauvage.

Il y a 3 autres tentes au bord du lac. Je salue Yukon, un texan à la barbe hirsute que j’ai souvent croisé depuis Stehekin. Il me demande à quelle heure je compte partir demain matin car il ne souhaite pas se retrouver seul au monument frontière. Personne ne le souhaite. Ne serait-ce que pour avoir quelqu’un qui nous prenne en photo pour immortaliser l’instant. Et aussi, quand bien même cette aventure est solitaire, pour partager ce moment de joie et d’abandon.
Un dernier bivouac sous les étoiles. Je choisis un emplacement avec soin de ne m’exposer à aucune chute d’arbre. Ce serait trop con de mourir si près du but. Je me doute que cela puisse paraitre ridicule mais ces derniers instants sur le PCT sont tellement intenses à vivre qu’il n’y a plus de place pour un comportement 100% rationnel.

Ce soir, sous la tente amie et confidente, je pense à ceux que j’aime. Ils sont dans ma vie une force qui m’anime, m’accompagne et me soutient. Dans cette aventure itinérante d’ermite, ils ont toujours été avec moi. Tous ceux qui marchent sur le PCT n’ont pas cette chance.
