J 128 bis – PCT Epilogue

Plusieurs jours ont passé depuis l’arrivée à Manning Park. Il aura fallu atterrir doucement et reprendre un peu le contrôle d’une vie vagabonde et insouciante.

Dernières traces sur le PCT


Après avoir passé quelques heures, côté canadien de la frontière, j’ai marché dans l’autre sens, en revenant sur mes traces jusqu’à Harts Pass avec la légèreté de ceux qui n’ont plus rien à prouver. Croisant et encourageant mes camarades dans leur dernière ligne droite. Je les enviais presque d’avoir encore quelques émotions à vivre avant l’arrivée.
Le 7 septembre, peu avant d’atteindre Harts Pass, je reconnais la silhouette de Crocodile. Au comble de notre joie de partager quelques minutes ensemble, nous nous félicitons mutuellement et avons du mal à contenir un trop plein d’émotion. Partis le 1er mai, nous aurons quasiment terminé ensemble cette aventure.

Viggo et Crocodile (PCT Class 19)

J’apprendrai, plus tard, que Psycho  atteindra le Canada le 10 Septembre et retrouvera Crocodile pour quelques heures.

Wesley « Psycho » made it !!!


De mon côté, Harts Pass marque l’ultime étape de ce PCT à rallonge. Un magnifique « trail magic » pour finir en beauté. De ces moments de partage et de simplicité qui donnent du relief à la vie.
Et comme celle-ci n’est pas avare de bonnes surprises, je retrouve Lucile, une française rencontrée (en janvier 2019) à Paris lors d’une réunion organisée entre futurs PCTistes. Elle a terminé en compagnie de Wolfie, un danois. Même s’ils n’ont pas parcouru l’intégralité du chemin, leur aventure aura été à la fois éprouvante physiquement et gratifiante sur le plan sentimental. Car ils sont tombés amoureux au fil du parcours.

Wolfie et Lucile

Autour du feu, nous sympathisons avec un couple d’Américains venus soutenir les « finishers ». Passionnés d’escalade, ils possèdent un chalet non loin de Mazama Village où ils ont décidé de vivre à l’année. Les discussions tournent sur l’après PCT. Et là possibilité d’aller au Mexique, dont ils reviennent enthousiaste après un voyage de 6 mois.
Tout naturellement, Jerry et sa femme, Annette, nous proposent (à Lucile, Wolfie et moi) de passer la nuit chez eux.
Ce fut une magnifique façon de terminer cette aventure. Un accueil chaleureux, un repas préparé en commun (avec baguette et fromage ) et le sentiment de partager ces moments privilégiés comme les membres d’une même famille.

Annette, Wolfie, Lucile et Jerry
Apéro autour du foyer
Préparation du dîner

Le lendemain, après un petit déjeuner copieux, ce sera le temps des adieux. Jerry me conduit gentiment jusqu’à la petite ville voisine de Winthrop où je passerai 3 jours à me reposer avant de rallier Seattle. Entre lecture, écriture, vidéos, burgers, bières et longues discussions avec les « PCT hikers » de passage, j’ai apprécié ces journées.

Avec Annette et Jerry, best « trail angels » ever !

J’ai eu le temps de troquer ma tenue d’aventurier contre quelques fringues plus classiques pour me préparer au retour à la ville. Un jean, deux tee-shirts et un sweat. Une coupe de cheveux chez le barbier local.

Retour (slow) à la real life

Puis, je prendrai le bus pour Seattle, via Wenatchee, afin de retrouver physiquement celle qui a « marché avec moi » pendant ces 128 jours.
Une autre magnifique aventure, à partager, se présente à nous.

Un road-trip de 3 mois qui nous mènera dans le grand Ouest américain, sur les traces des aztèques au Mexique puis dans les premiers frimas de l’hiver canadien.


Une explosion de souvenirs, d’images et d’imprévus.
Il y aurait tant à raconter.
Mais c’est déjà une autre histoire.

Beautiful Widerness
Oregon Coast
Golden Gate Bridge
Nuit à Monument Park

See U soon.

Revue de paquetage

Du pratique, du léger, du robuste à défaut d’esthétique.

Pour les couleurs, on repassera. Sans être un inconditionnel de l’équipement et du matériel ultra-light, je reconnais avoir pesé le pour et soupesé le contre plusieurs fois avant de constituer mon « paquetage ». Et donc d’avoir privilégié le technique et le confort au « fashion »

Avec certains choix et renoncements très personnels (et donc discutables), je constitue peu à peu ma « pack list » pour le PCT. Il me reste à acquérir encore quelques éléments indispensables (pour la Sierra) et trouver le temps de tester le nouveau matériel en situation réelle proche du PCT.

A ce jour, voici l’essentiel des items testés et retenus. Je précise que ces choix sont réalisés en toute indépendance, sans intention de promouvoir telle ou telle marque.

Bivouac (les big 4)

Sac Gossamer Gear MARIPOSA 60 litres : pratique avec son rapport poids/volume idéal. Solide (peut porter jusqu’à 16 kg) et résistant à l’abrasion. Testé sur le GR10, j’apprécie surtout ses grandes poches latérales (bouteilles accessibles en marchant), sa ceinture confortable. Côté esthétique, c’est bof, mais je m’en fous. Poids à vide 838G.
Sac de couchage ZPACKS classic -7°C : le top. Je l’ai pris en taille L pour 1,83m maximum (je mesure 1,75) sans capuche. Gonflant impressionnant 900 cuin, j’utilise son sac de compression étanche. Testé par des nuits sous 0°C, un confort total pour seulement 568G.
Tente BIG AGNES Fly Creek HV UL1 + Piquets et sardines (changées celles d’origine pour des titane). Tente double toit très bien conçue. J’aime son volume avec une hauteur suffisante pour rester assis, de la place pour entrer le sac. Petite abside, bonne ergonomie et semi-autoportante. Testée plusieurs nuits par tous les temps, peu de condensation, bonne résistance au vent et à la pluie. Inquiétude toutefois quant à la possible fragilité du sol (je l’ai pourtant utilisé sans tapis de sol). Poids total vérifié 865 G
Matelas gonflant Thermarest Neoair Xlite. Rien à dire, c’est un must. Pris en taille regular car j’aime avoir le corps entier sur le matelas. Confort et isolation pour le meilleur rapport poids/volume du marché. Poids 350 G.
SitPad mousse Z Lite: une petite fantaisie. J’ai découpé un morceau d’un vieux et inusable Thermarest Z Lite (4 panneaux) pour en faire à la fois le frame de mon sac MARIPOSA et un support pour m’assoir (ou m’agenouiller) en étape ou au bivouac. Idéal à l’entrée de la tente. Testé sur plusieurs randos, c’est devenu un incontournable . Poids 117 G

Hygiène – Cuisine – Électronique


2 Sacs étanches Cuben de ZPACKS: 1 dry bag pour les vêtements et 1 big food pour la nourriture. Etanches et très légers. Les deux pour 57 G
1 filtre Sawyer Squeeze (67 G) + bouteille souple 2L (28 G): système testé en plaine et dans les Pyrénées, pratique et rapide. J’emporterai bien sûr, une fois aux USA, des bouteilles d’eau en complément (2 smartwater 1L)
1 serviette microfibre PackTool Nano + 1 pince à linge: 40 G
1 trousse toilette: dans un sachet Ziploc (morceau de savon d’Alep, brosse à dent et dentifrice voyage, 1 rasoir jetable, flacon nalgene pour crème solaire) : 140 G
1 trousse pharmacie dans un sachet Ziploc (assortiment avec pansements, ibuprofène, antiseptique, épingles à nourrice, pince a épiler et ciseaux) : 100 G
Kit cuisine composé d’1 pot repas avec couvercle 600 ML (ancien pot de glace), 1 spork Sea to Summit 9 G (cuillère et fourchette en titane) + 1 couteau Fimam Chapa 27 G + 1 briquet bic mini + 1 tasse repliable Wildo 24 G + 1 mini salière (sel mélange perso avec ail, piment d’Espelette et poivre) + 5 G d’éponge coupée. PAS DE RÉCHAUD (oui, je sais ça se discute, mais j’ai l’habitude de randonner ainsi).
1 lampe frontale Black Diamond Ion: 31 G
1 smartphone Samsung Galaxy S7 Edge (157 G) + écouteurs. Les points positifs: bonne qualité de photo + autonomie assez longue + écran large pour confort de lecture et de rédaction de posts sur l’application WordPress.
1 batterie Anker Powercore 10000 A (185 G) + 1 chargeur Dual USB Quick Charge 3.0 (130G) avec adaptateur US. A voir sur la durée !
1 paire de bâtons de marche CAMP Xenon 4 : légers et pratiques, repliables en 4 (280 G la paire). C’est un choix discutable car j’ai un doute sur leur durée de vie US. Ils ont beaucoup bourlingué et j’en suis satisfait mais Je les utilise surtout à la montée, car leur usage n’est pas conseillé à la descente.

Vêtements hauts

Equipement PCT 3
1 Doudoune CUMULUS incredilite 115G duvet : Sans aucun doute, dans le top 3 des valeurs sûres de cette pack-list. D’un rapport poids/volume excellent pour un confort de chaleur total. Elle sait se fait oublier au fond du sac (dans son propre sac de compression) et apporte la chaleur nécessaire le soir au bivouac ou dans les premières foulées du matin. 295 G
1 veste Outdoor Research Helium II: imperméable et respirante. Suffisamment légère pour servir de simple coupe vent, je l’ai utilisée surtout dans des conditions exécrables de météo, elle fait le job. Bien taillée, j’apprécie le zip total et la capuche avec visière réglable. Elle ne pèse que 180 G.

1 tee-shirt Vertical Désert FFRP, à manches longues et capuche: en Drylight, il évacue l’humidité et sèche rapidement. La coupe et son tissu extensible le rendent indispensable pour la randonnée estivale et l’alpinisme. 120 G
2 tee-shirts techniques Odlo (manches longues) et Décathlon (manches courtes) : 165 G. Pas vraiment fixé sur ce choix, je cherche encore du côté des tissus en mérinos.
Tour de cou (Kalenji) qui sert aussi d’oreiller (55 G), casquette (55 G), paire de sous-gants de running (23 G), paire de lunettes de soleil
1 parapluie Sea to Summit Mini trekking; je sais que beaucoup s’en passent mais j’apprécie son utilité à la fois en protection du soleil et de la pluie tout en permettant une aération optimale du bonhomme. 155 G

Vêtements bas

Equipement PCT 4
1 pantalon léger (Wedze): l’article maintes fois éprouvé que je possède depuis 8 ans. A la fois confortable, coupe vent et très léger. Pas waterproof mais sèche très vite. 210 G
1 Short Odlo Zeroweight X Light: pratique, aéré et sait se faire oublier. Testé et approuvé sur le GR10 et en course à pied. 90 G
2 Boxers Icebreaker Anatomica: le confort et les avantages antibactériens et anti-odeurs de la laine mérinos. 55G pièce.
2 paires de chaussettes Injinji: taille basse (catégorie Running). 5 doigts séparés, confortables; j’ai hésité à aller vers ce que je pensais être un gadget mais j’ai été bluffé par le résultat. Testées en situation de trail 15 jours intenses par tous les temps et aucune ampoule. 2 x 35 G
1 paire de chaussures Altra Lone Peak 3.0. J’apprécie surtout leur polyvalence et leur largeur pour les orteils (toe box). Leur plateforme Zéro Drop a beaucoup sollicité mes tendons d’Achille au début mais il faut reconnaitre que j’ai gagné en souplesse. Je pense partir avec 1 paire supplémentaire (modèle plus récent Altra Lone Peak 4.0) que j’expédierai avec mon « kit spécial Sierra » à Kennedy Meadows.

Pour le reste des items, voici ma liste complète (ou presque) pour un poids de base de 5,36 KG. But to be continued.

PCT Français
Et hop, le sac est rempli (le drapeau français est optionnel. Tendance « Champions du Monde » )

Dis-moi pourquoi tu marches ?

Ah la belle question que voilà ! En apparence anodine mais qui touche à l’essentiel. On pourrait aussi dire dis-moi « A QUOI » tu marches ? Ou « VERS QUOI » tu marches ?

Car au-delà de toutes les considérations matérielles et pratiques, des bienfaits de l’activité physique pour le système cardio-vasculaire, des shoots d’adrénaline et d’endorphine pour réguler le sommeil ou la libido, des calories brulées pour garder la ligne ou d’un quelconque défi réussi pour accrocher une « médaille » à son tableau personnel, etc… Il faut bien admettre qu’il n’y a pas de vérité, de raison ou d’urgence à choisir la marche.

Marche inutile

L’époque est à la glisse, à l’assistance ambulatoire, à l’effort mesuré, à la téléportation. Le piéton et le randonneur sont des anachronismes. Tolérés pour leurs bonnes manières, leur faible empreinte carbone ou leur état transitoire.

« Un piéton n’est jamais qu’un individu qui va chercher sa voiture » – Frédéric Dard.

Il parait que dans certaines zones résidentielles des US, le fait de se déplacer à pied attire immédiatement la suspicion. Il faudra donc bientôt avancer une explication sensée à la divagation pédestre. Sans en arriver à cet excès, il est vrai que, d’escalators en deux-roues électriques, de jobs sédentaires en plateaux télé, ma vie citadine et paresseuse est une dissuasion permanente à la marche.

Marche essentielle

Alors, quelle force imbécile ou lucide me pousse à mettre à l’épreuve la mécanique du corps ? A rompre avec le confort nourricier d’un quotidien rassurant ? A préférer la lenteur aux fulgurances et aux inerties de l’époque ? A partir plutôt que rester ?

Je me garderai bien d’amorcer un début de réponse tant elle serait banale sinon décevante.

En février 2007, à l’hospice de Roncevaux où je fis une pause lors d’une longue étape sous la neige, je renseignai le questionnaire ouvert aux pèlerins de Compostelle afin d’obtenir un magnifique tampon sur la créanciale. A la question « pour quelle raison, faites-vous le Chemin de Compostelle ? », je cochai toutes les cases (Spirituelle, Sportive, Culturelle, Religieuse, etc…) et rajoutai même « JE NE SAIS PAS ».

Dix ans plus tard, à quelques mois du PCT, après avoir usé des dizaines de paires de chaussures, allégé avec zèle le sac à dos et accroché malgré moi quelques rides au front, je ferais sincèrement la même réponse.

Qu’il s’agisse d’un pèlerinage, d’une aventure sportive au long cours ou d’une balade dominicale, toute marche est un voyage intérieur. En s’imposant un rythme et une temporalité différents, on s’ouvre à la réflexion, à la contemplation et à la méditation. L’itinérance et la vie nomade sont pour moi un moyen de vivre tout cela, d’éprouver la liberté et de connecter « ce qui m’entoure » à « ce qui m’habite ».

Marche naturelle

Enfin, argument convenu ou excuse facile, j’aime dame Nature et ses atours : le rythme des saisons, les cycles de lune, l’odeur de la pluie d’été et du foin coupé, le vent dans les arbres et l’air du large, le bruit de l’eau, le silence des cimes, les premières traces dans la neige, la lumière du matin, la voie lactée, les nuances de vert, le sable sous les doigts, le goût des fruits glanés, les sentiers de montagne et ceux qui ne sont sur aucune carte.

Marcher, c’est simple comme mettre un pied devant l’autre. C’est provoquer la chance d’aller à la rencontre des autres et de soi-même ; de faire cohabiter l’absurde et la quête de sens, l’acuité et le lâcher prise, les grands espaces et l’Intime. D’en apprendre toujours davantage tout en continuant à ne rien savoir.


« Le froid, le silence et la solitude sont des états qui se négocieront demain plus chers que l’or. » – Sylvain Tesson

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